Catégorie : Reste

#2367

c’est facile à dire

(le bonheur)

il suffit d’un vers

Pour la pierre, il faut toute la prose. 

#2365

Les nuages étaient parfaits.
Ils ne retranchaient rien au ciel.

: Journal

#2241

à plat c’est l’horizon qui prend la lumière l’aspire la laisse monter du bas il ne tombe pas il flotte il aspire la lumière il laisse venir la pauvre lumière du soir est-ce le soir la nuit entre chien et loup les chiens je les entends chaque nuit lorsque je suis vide devant la page le loup est dans le nom du lieu où j’écris la lumière monte jusqu’à être prise dans la grille et susciter un code hexadécimal c’est à plat que je la regarde elle l’image maintenant posée sur la feuille recouvre les lignes un œil pour elle l’autre œil pour la moitié droite des phrases deux mains symétrie de l’une à l’autre c’est une image d’hier de l’autre nuit il suffirait d’aller dans l’autre pièce celle où on est debout se pencher par la fenêtre pour voir où était l’instant où elle a été tout identique sauf la nuit la nuit sera là quand j’aurai fini d’écrire le mur en descente presque bleu depuis la fenêtre bord de l’image juste avant la chute il n’y a pas eu de chute

#2310

comment oublier ses noms comment dire non à la nuit comment pleurer en lisant un petit traité comment tordre le sable comment mâcher un mot griffé sur un mur comment se lever dans le rêve comment faire un verre d’eau d’un livre comment donner un titre d’or à chaque heure comment déduire le nombre d’une colonne comment mordre une lettre à dieu comment dire le vide avec un escabeau comment multiplier l’océan comment faire le vent en soi comment poser son désespoir sur une plaine comment rire dans une forêt comment se plier pour l’aurore comment et pourquoi se débarrasser de l’amour

#2275

Il faut penser le fauve et l’ici jusqu’à les confondre. Le fauve est ici. L’ici est fauve. Ou bien, l’ici est le fauve. Non pas l’illumination, mais la dévoration. Regarde l’érection du lampadaire, le lac de la table. Ils te verront mort dans la faille d’un instant et continueront de taire. Se retourner est vain, tout comme s’arracher la peau croyant débusquer la peur sur son envers. À se découper en cubes, nul ennemi serait offert à la lumière. Imaginez dents, regard fixés, ronds ou amandes. Voici le conte qui fait oublier la fourrure douce, celle qui devenue boule de poils étouffe depuis la gorge. Le mot distrait.

#2323

– Tes mains puent le foutre des autres.

– Tes mains puent sur la table. Elle oublie, elle attend, elle supporte. Tout passe pour elle et d’abord les mains qui se posent sur elle, qui donnent à son assise ce qui pèse ou peu, car elle s’appuie sur cette portion de ciel qui est au-dessus d’elle.

– Tes mains puent toujours, elle me disait, et mes mains trop grandes, trop lourdes, les doigts fondus les uns dans les autres, je ne savais qu’en faire dans l’appartement étréci, aucun objet n’était fait pour elles, trop légers, trop de replis pour la peau durcie.

– Tes mains puent à force de me toucher, de suivre plaines crispées, champs de peur, sillons de douleur, plis de l’âge, de tourner, de pincer, de tirer.

– Tes mains puent sur mes seins, ils deviennent plâtre, par des veines inconnues, la rigidité entre en moi, je me fige, il y a une seule image qui ne bougera plus.

– Tes mains puent, elles tombent au bout de tes bras, elles les tirent vers quoi, la terre, la tombe, tu ne fais que tomber, tu n’es plus qu’en bas, ton souvenir, c’est ce qui pue, qui te précède quand tu entres, qui reste là après ton départ, la fuite, ce qui sera après toi, pas d’image, pas de voix revenant, tu es la seule odeur dont je me souviendrai.

– Tes mains puent d’être trop fines, trop blanches, trop froides, trop lisses, trop molles, trop lentes, trop douces.

– Tes mains puent si tu touches le bouton de la porte, tes mains puent si tu pousses la fenêtre, tes mains puent si tu donnes la lumière, tes mains puent si tu suscites l’étincelle du briquet, tes mains puent si tu écartes les pages d’un livre, tes mains puent si tu empoignes ce qui pique et coupe, tes mains puent si elles brisent le pain, tes mains puent sur le lacet dénoué, tes mains puent plongeant dans l’eau, toute eau, tes mains puent sur le plat, tes mains puent sur le drap, tes mains puent sur les coudes, tes mains puent sur ma bouche, tes mains puent sur mon cou.

– Tes mains puaient encore dans le soir doucereux.

carnet

les nouvelles entrées sont ajoutées au début du texte ; les entrées de chaque jour sont séparées par ||

le vent et le soleil : le matin maximise l’espace – nulle promesse ni accomplissement – la plus grande amplitude | à la fois dans l’ombre et dans la lumière | le vent se voit à ses effets et à ses franges | balayer la poussière les toiles d’araignées les poils des chattes tout cela en tas et nuages l’idée de lieu de départ paisible – dimanche après-midi || une chaise au milieu de la table | fenêtre que l’on croit ouverte et l’une est devant songe-t-elle à sauter | tu es la vague || la pointe de la langue trouve changée le cachet pensée de la méprise du poison | la verge de froid | les anciens noms ceux qui sont dans le passé les chercher trouver des images et des phrases | rire au souvenir que l’on pourrait avoir de toi || nier ce qui est sale | écrire sans regarder sans regarder ce qui est écrit sans regarder le ciel sans regarder ce qui ne tombe pas sans regarder le drap sans regarder la main || dans la pluie sur la route espace réduit comprimé tu es dans la pluie son battement | vent doux puis froid | rester dans l’enveloppement | âge tu te recroquevillée || on t’a dit attend est-ce seulement une voix | pas d’espace ni de césure | je ne suis pas encore moi au matin | l’hiver reste sec de silence | un parking n’est jamais vide || écrire en attendant écrire dans l’attente dans son intérieur | donne une terre au vide | mégot de cigare sur le goudron il est l’abandon il l’est contenu et s’effeuillant | ici jamais personne ne s’est arrêté aussi longtemps personne n’a regardé aussi longtemps que tu le fais | ce qui est presque une chanson | où commence-t-elle la chanson | les protestations de ceux qui attendent tu connais tous les mots chanson elle est en toi traduite || une silhouette son inclinaison puis son nom et les phrases le canal le lieu de trois années tout revient à huit heures du soir le jour de l’épiphanie || je suis dans la fatigue ce qu’il y a de plus profond de plus lourd | seul immobile sur la place le seul à être seul les amis les familles les enfants en jeu | cette phrase la seule lue du récit écrit dans une autre langue it was high time pour toi maintenant l’injonction || droit à l’oubli sera plus facile | l’amie dans quelle ville quelle nuit comme la main qui trouve table où s’appuyer et c’est un bruit doux | tu comptes quoi dans la nuit | passer d’un style à l’autre identique | je me soucie de son nom lui qu’elle avait aimé et de son tatouage | trieste c’est un nom qui semble facile | naviguer palis les rêves les voix les mots du jour au | lit allongé sur le dos revient le rêve d’hier soir dans la même position lumière à peine éteinte || cherchant la poussière | la parole est facile en lui | dédain depuis ton lit | les mots presqu’à l’aveugle presque je devine leurs formes seulement en écrivant | à qui envoyer une phrase chaque jour | il s’agit titre | chambre nue chambre de nu chambre aux nus tout serait dans la lumière | vous n’avez plus de couleurs | la magie se reconstitue | elle a des facilités pour l’amour | la phrase serait entière | je partirait de nuit || le gouffre en toi de toi n’est pas la peur c’est l’abyme où entrer pour être | écrire à la lumière des lampadaires les caractères sont compressés par la main est-ce qu’une page serait la nui entière | on passe derrière moi | un texte fait de phrases banales | quand j’appuie sur la feuille l’ombre s’avance puis s’écrase puis rejoins presque ce que j’écris || ce qui compte c’est l’espace | la pluie souvenue revenue elle s’égoutte elle dans la nuit la nuit est en elle | dentelle tu n’es pas le labyrinthe | où es la folie penses-tu en regardant la folle où suis-je penses-tu en regardant le miroir | l’homme ivre titube très lentement l’année commence très lentement il s’appuie sur ma voiture |se réfugier dans la fin | les fins provisoires c’est fini || un tableau dont le titre serait chaque dimanche matin | le mot qui était dans la bouche dans la rue : bourrelier et je le savais pas dans la langue que j’entendais | le silence de l’après-midi tu pourrais te dissoudre dans la tâche dans cette pièce de bureau familière | tout le jour près d’un homme jusqu’à ce que le peu de confiance de compassion | penser à écrire ici penser ici dire là | publier l’intégrale de mes ratures | illisible | illisible | pas de drogue le réel  || l’hiver est matin à l’espoir | tous les lieux où tu n’as pas écrit | un musique qui prendrait au piège le temps pour toi | le dos par cadeau | j’écris parmi les miettes | la limite de la page est un élastique || odeur de beurre sur l’ongle | penser par quatrains | elle dit qu’elle sent la présence de son père et de sa mère mort il y a tant d’années elle dit je le dis à mon frère il me dit moi aussi la folie la vérité en tourbillon je pose la main sur son épaule je me tais | dieu des pauvres donne nous des feuilles blanches | le dessin est dans la nuit | amaigrie retirée blanchie les yeux agrandis perdus | je n’ai presque pas regardé par la fenêtre | heure où j’ai cru avoir la fièvre | heure combien de fois répétée où j’ai cru être perdu || le bruit de l’eau déversée par le tuyau noir de l’autre côté de la rue à chaque fois  que la porte est ouverte surprise de cette fontaine | le bruit du temps le temps n’a pas de bruit | l’instant est-ce que cela compte || les visages qui passent ne sont plus dans l’instant déjà dans la mémoire perdue | tu déposes les questions comme l’enfant que l’on va abandonner les pierres que nul ne picorera | tu disposes les questions | équilibre le mot ricane à l’intérieur | appuyé incliné sur le pilier il parle au téléphone et regarde à travers la baie vitrée le fils qui plonge et replonge || chambre comme retour mais il n’y a pas eu de voyage | demi-sommeil d’une heure et pensées sur la cuisine des voisins puis découverte la casserole oubliée sur le gaz le plastique du couvercle brule | les phrases par elle | les pas sur ma tête immobile || le clignotant palpite dans un seul œil | tu aurais pu tuer tourner la page || changer la couleur rien ne change encore change | changement de focale ils ne comprennent pas || ce n’est pas le désir seulement l’ennui l’avancement dans la nuit | retombée de la masse musicale est-ce qu’il y a quelque chose comme cela dans ta journée | je relis oubli d’avoir écrit ce nom et cet autre et de les avoir désiré || vacillement du corps de debout dans l’attente | La pluie cessée | le pas seul || dans sa silhouette l’éloignement | Les prospectus mouillés de pluie enfilés dans les boîtes aux lettres a cumulés tombant pliés perdant leurs couleurs | à vendre au fond de la ruelle | Regarder les poubelles les sacs leur opulence || la pile à terre élancement elle est à moi recul réfléchi | un bruit rapide à arriver et à partir | regard au sol : quelles sont les formes | debout à côté de son audi tête rejetée en arrière le croque-mort culturiste | appeler le père cela passe | la fumée beaucoup de fumée devant lui qui est de dos tête couverte comme s’il fumait plusieurs fois | rouge parfait cette pensée mais c’est une voiture neuve | en 1984 il écrit ripoliné d’un autre siècle le maître et un autre aussi de la même date | il n’y aura plus de journal s’il y a ceci | visage croisé sur l’autre chaussée je pense à ta fougue je manque de m’écraser dans le rouge du camion devant moi | le chignon au-dessus de la tête légèrement en arrière je ne l’aime que depuis toi toi passée lointaine | je suis bien  là chanson traîne | le verre vide de café oscille sur la soucoupe la cuillère est en porte-à-faux c’est moi le démiurge | elle désire peut-être aime-t-elle l’autre est plus réservé tacticien dessiner les figures géométriques les courbes de niveau | la fin comme une porte mais il y a seulement des fenêtres vastes parfois nettoyées rarement et l’enfant en course alors y cogne le front | tu n’es pas là – certes – dans les heures herbes qui balancent dans la séance presque du vent | l’arbre où j’avais déposé le livre celui de la traversée des enfers | certes est ton mot | dans l’air non en moi non

#1887

La pluie marque le fond du rêve, une rive brève, un pas rapide, un, et le pavé, carré de l’Empereur, à même la dalle grise. Tu es au cœur, c’est à dire tard, déjà, un peu au-delà d’un bras tendu, la nuit. Les enfants sont au

#1775

Il faut imaginer les dieux en fuite, ignorant les chants les célébrant, fuyant à la vue des temples, repoussant la puissance, apeurés par les adeptes, niant jusqu’à leurs noms, se perdant dans le temps.

#1492

On a si souvent rêvé la rondeur. Elle caresse le regard et le velours de l’herbe verte sollicite la main. On ne découvre pas une colline, on la retrouve. Elle ramène à une douceur jamais vécue et familière. La terre entre dans le ciel, sans heurts et il n’est plus l’infini effrayant. On entre dans le paysage et on sait qu’on est encore hors de lui.